Ce n’est pas une « crise », mais il est bien vrai que la situation n’est guère réjouissante
12 février 2015
Afin de renforcer les thèmes prévisibles de sa campagne qui sont fondés sur la peur et l’insécurité, Stephen Harper a pris le parti d’assimiler la situation économique actuelle du Canada à une « crise ».
Si c’est cela qu’il cherche à faire valoir, on est en droit de se demander qui peut bien être le responsable de cette prétendue « crise ». Et pourquoi le Canada est il à ce point vulnérable – après plus de neuf années avec Harper comme chef du gouvernement et près de six ans après la fin officielle de la récession?
La bonne nouvelle en ce qui concerne cette série d’échecs, c’est qu’il y a moyen d’y remédier, et ce dès que les Canadiens auront l’occasion de choisir un nouveau et meilleur gouvernement.
Il ne fait aucun doute que la situation économique de notre pays n’est guère réjouissante, mais vouloir la qualifier de « crise » n’est rien d’autre qu’une manœuvre d’intimidation, qui en dit plus sur la personnalité de M. Harper que sur l’état de l’économie. Apathique et souvent incohérent, son gouvernement ne semble pas savoir quoi faire pour aborder les difficultés, et c’est pourquoi il a botté le problème du budget en le reportant au prochain exercice.
La crise dont il est ici question en est une de leadership – neuf années de médiocrité partisane! Et si l’on y regarde de plus près, plusieurs autres mots à forte connotation nous viennent à l’esprit pour dépeindre la performance de ce gouvernement :
Irréfléchi – Comment qualifier autrement ce nouveau gouvernement qui, en 2006, a hérité de ses prédécesseurs libéraux de la meilleure situation budgétaire du monde occidental, pour ensuite tout dilapider en moins de deux ans, renvoyant ainsi le Canada une fois de plus en situation budgétaire déficitaire, alors que l’économie mondiale prospérait toujours.
Obstiné dans le déni – Quelque temps après, en 2008, alors qu’il était clair qu’une récession était à nos portes, M. Harper a délibérément trompé les Canadiens au lieu de les préparer à ce qui les attendait. Il a refusé de reconnaître l’imminence d’une récession ou le risque d’un déficit. Il a imposé une cure d’austérité comme seule action politique et il a prévu, à tort, cinq autres budgets excédentaires.
Incompétent et trompeur – C’est en ces termes que le vérificateur général et le directeur parlementaire du budget ont qualifié le gouvernement Harper en raison de la maladresse dont il avait fait preuve dans le dossier d’achat de chasseurs F 35 pour l’armée de l’air. Les coûts de ce projet ont augmenté démesurément, passant de 9 milliards à près de plus de 50 milliards de dollars, et le Canada n’a toujours pas encore reçu un seul de ces nouveaux avions.
Cas flagrant de mauvaise gestion – Voilà une façon bien aimable de qualifier la débâcle du Programme des travailleurs étrangers. Ce gouvernement, après s’être vu confier la gestion d’une série de programmes qui avaient connu pas mal de succès au cours des 30 années précédentes, les a complètement bousillés : aucune donnée fiable relative au marché du travail, aucun contrôle ni aucun plan de mise en application, manque cruel de voies d’accès à la citoyenneté, et aucune solution pour les employeurs qui sont toujours en manque de travailleurs.
Dépenses déraisonnables – De par son avalanche de publicités payées à même les fonds publics, son recours à une ribambelle de consultants externes, son Cabinet gonflé, ses somptueux bureaux et l’énorme Cabinet du premier ministre, ce gouvernement dépensier doit certainement figurer parmi les plus nombrilismes de l’histoire.
Parti pris – Ce gouvernement a utilisé des fonds destinés aux passages frontaliers pour faire construire des belvédères ornementaux et des trottoirs au beau milieu de nulle part, à seule fin d’en mettre plein la vue dans la circonscription d’un certain ministre. Il a créé un programme pour venir en aide aux personnes handicapées, mais l’a dénaturé pour favoriser les députés conservateurs. Il a fait de grandes promesses aux anciens combattants pour qui le Parlement avait voté des crédits, puis en a récupéré plus d’un milliard de dollars uniquement pour aider M. Harper à donner l’apparence d’un budget équilibré.
Idéologie aveugle – Il suffit de penser à la destruction du questionnaire de recensement, qui a pour effet de ruiner peu à peu la base de données qui permettait aux Canadiens de prendre des décisions délicates. Pensons aussi aux chercheurs qui ont été muselés puis privés de leur financement. Ce ne sont là que deux exemples d’un gouvernement guidé par des préjugés, et non par des faits.
Manquement au devoir – Le gouvernement fédéral a l’obligation fondamentale de mettre en circulation les produits sur les marchés mondiaux; mais c’est bien le régime de M. Harper qui tenait les rênes lorsque deux projets de pénétration de marché se sont soldés par un échec. L’an dernier, son système dysfonctionnel de manutention et de transport des céréales a coûté aux agriculteurs plus de 5 milliards de dollars. Et malgré toute leur bravade concernant l’exportation d’énergie, les conservateurs ont échoué dans tous les projets majeurs de pipelines auxquels ils ont participé – neuf années sans avoir fait aucun progrès.
Priorités douteuses – Avec un taux de croissance moyen de seulement 1,7 % par année depuis qu’il a pris le pouvoir, en 2006, M. Harper affiche la pire performance en la matière à titre de premier ministre depuis les sales années 1930, alors que R.B. Bennett était à la tête du pays. On pourrait penser qu’il serait intéressé à investir dans la croissance, par exemple dans des projets de transformation des infrastructures communautaires. Mais non, il a réduit de plusieurs milliards de dollars le budget de son « Fonds Chantiers Canada », dont les trois quarts ont été reportés jusqu’après 2019. Il a préféré plutôt dépenser plus de 12 milliards de dollars dans un programme de fractionnement du revenu qui est favorable aux familles riches. Nul autre que le regretté Jim Flaherty avait qualifié ce programme de trop coûteux et injuste, puisque 86 % des ménages au Canada ne seront jamais en mesure de s’en prévaloir, et parmi ceux qui le pourront, ce sont les plus fortunés qui en tireront les plus gros avantages.
Et on pourrait poursuivre indéfiniment.
La bonne nouvelle en ce qui concerne cette série d’échecs, c’est qu’il y a moyen d’y remédier, et ce dès que les Canadiens auront l’occasion de choisir un nouveau et meilleur gouvernement.