Justin Trudeau prononce une allocution lors du dîner de remise des Prix honorifiques Catalyst 2016
17 mars 2016
Merci beaucoup, John, pour votre aimable présentation.
Je tiens aussi à remercier Catalyst, ses dirigeants, conseillers, membres du personnel et bénévoles, pour avoir organisé cet événement exceptionnel.
Et merci à chacune et à chacun d’entre vous d’être ici avec moi ce soir.
En parcourant le programme pour la conférence d’aujourd’hui, j’ai été impressionné par les grands thèmes qui ont été retenus, et, plus particulièrement, par les mots utilisés pour décrire le travail important que vos organismes accomplissent, et espèrent accomplir de plus en plus.
Des mots comme autonomisation, responsabilisation, courage et humilité.
Ce type de mots – ce type de valeurs – est ce qui bâtit de meilleures communautés. Qu’il s’agisse de la communauté d’affaires et de tous ceux que vous servez, ou du milieu politique et des citoyennes et des citoyens que nous servons.
Ce soir, je voudrais parler de ces quatre valeurs et des moyens par lesquels mon nouveau gouvernement travaille avec acharnement pour les mettre en pratique.
Mais avant de poursuivre, je veux prendre un moment pour vous parler d’une femme qui pour moi représente ces valeurs dans tout ce qu’elle entreprend. Ma femme extraordinaire, Sophie.
Sophie est une mère hors du commun, une collaboratrice audacieuse et une défenseuse engagée des femmes et des filles face aux enjeux qui les touchent. Demain, elle prononcera une allocution lors de la rencontre Not The Cost organisée par le National Democratic Institute.
Sophie me pousse à être meilleur et à travailler avec plus d’acharnement jour après jour. Sans son leadership et son exemple, je ne me tiendrais pas ici devant vous ce soir.
Merci Sophie de te tenir à mes côtés tout au long de mon périple.
Félicitez le PMJT!
Aïe! Nous n’avons pas retrouvé votre formulaire.
Comme vous le savez, l’« autonomisation » est l’un de ces concepts dont il est facile de parler, mais qu’il est beaucoup plus ardu de mettre en pratique. Tout ce qui modifie fondamentalement l’équilibre des pouvoirs prend du temps, et beaucoup de travail acharné.
Je le sais pour en avoir fait moi-même l’expérience. Je suis ici ce soir car j’ai aidé à former le tout premier cabinet paritaire au Canada. Pourtant, cet objectif n’a pu être atteint que grâce aux années d’effort qui l’ont précédé.
Oui, nous sommes en 2016, et nous avons fait des progrès, mais si nous y sommes parvenus, c’est grâce à tout le travail déployé en 2015, en 2014, en 2013 et en 2012.
Ceci va vous intéresser : certaines études ont montré que les femmes sont moitié moins susceptibles que les hommes de se considérer comme des candidates potentielles aux élections. En fait, nous n’avons pas besoin d’étude pour nous le confirmer. Nous le constatons nous-mêmes chaque fois que nous demandons à des femmes de se présenter.
Quand on demande à un homme s’il souhaite se présenter comme candidat, le plus souvent, il répond : « Quand puis-je commencer? »
Par contre, quand on pose la même question à une femme, sa première réaction est différente. Le plus souvent, c’est une surprise. Elle demande si nous sommes sérieux. Elle veut savoir pourquoi nous trouvons qu’elle a les qualités requises pour le poste.
Les chefs d’entreprise ne cessent de me le dire : la réaction est la même quand ils recrutent à un poste de direction. Le problème ne se limite donc pas au seul milieu politique.
Nous avons tenté de changer les choses en mettant sur pied une campagne intitulée « Invitez-la à se porter candidate ». Par le truchement des médias sociaux et d’autres réseaux, nous avons demandé aux Canadiens d’inviter des femmes qu’ils connaissaient – des femmes déjà connues comme travailleuses infatigables et dirigeantes communautaires – à se présenter comme candidates.
Et pour aider celles qui étaient intéressées à franchir le pas, nous avons élaboré un processus pour les aider à comprendre les étapes suivantes.
D’autres femmes sont entrées dans la fonction publique après qu’on le leur ait demandé… avec insistance.
Prenez, par exemple, notre extraordinaire ministre du Commerce international, Chrystia Freeland. Elle et moi avons eu de longues conversations sur la réalité du travail en politique, et de ses exigences. Je suis ravi qu’elle ait décidé de se présenter car, depuis lors, elle est devenue une membre précieuse de notre équipe.
Je vous ai donné un exemple d’un programme particulier qui, selon moi, a vraiment changé les choses. Cependant, comme je l’ai dit précédemment, nous sommes tous responsables envers les générations à venir des décisions que nous prenons aujourd’hui.
Comme beaucoup d’entre vous le savent, je suis un féministe, et je suis fier de l’être. Je suis convaincu que les femmes peuvent faire – et être – tout ce qu’elles veulent. Cependant, je sais aussi qu’un changement culturel ne pourra pas se produire si seulement la moitié de la population s’efforce d’y parvenir. Les hommes aussi doivent agir, montrer l’exemple, et servir de modèle.
Dernièrement, ma femme Sophie m’a précisément rappelé ce point. J’ai toujours tenté de m’assurer que ma fille se sente autonomisée, qu’elle comprenne que ce n’est pas parce qu’elle est une fille que cela la limite dans ce qu’elle peut accomplir – et que cela ne doit jamais être le cas. Mais Sophie m’a rappelé que je devais consacrer autant de temps et d’efforts à mobiliser mes fils et à leur parler du féminisme et de l’importance de l’égalité.
Les hommes ont un rôle primordial à jouer pour exiger et appuyer ce changement sociétal. Nous devons prendre la parole pour appuyer l’égalité des sexes et nous sentir à l’aise d’être, nous aussi, des féministes.
Car en fin de compte, nous devons tous rendre des comptes, que nous soyons des femmes ou des hommes. Nous sommes tous responsables de veiller à ce que le changement souhaité autour de la table du conseil d’administration soit aussi un sujet de discussion autour de la table du souper familial.
Nos filles et nos fils ne méritent rien de moins que cela.
La troisième valeur, le courage, est apparemment celle pour laquelle je suis ici ce soir. Je dis « apparemment » car si certains considèrent qu’établir la parité hommes-femmes au Conseil des ministres est un acte courageux, ce n’est pas vraiment ainsi que je le conçois.
Est-ce courageux de vouloir que les membres du gouvernement soit le reflet plus exact des personnes qu’ils représentent et pour lesquelles ils ont été élus?
Est-ce courageux de vouloir diminuer les obstacles en donnant à nos filles et à nos fils des modèles efficaces et visibles?
Est-ce courageux de vouloir offrir aux citoyennes canadiennes et aux citoyens canadiens les meilleurs résultats possible, ce qui, nous le savons, se produit quand on adopte une approche du leadership plus inclusive et plus représentative?
Pour moi, ce ne sont pas des marques de courage. C’est plutôt ce qu’il convient de faire. Un choix intelligent.
À vrai dire, le véritable courage, est celui dont une femme fait montre quand elle décide de se lancer sur la scène politique, même après avoir été témoin de l’hostilité qui est si souvent son lot.
Le véritable courage, c’est de lutter pour obtenir une augmentation, car vous savez mesdames que vous méritez un salaire égal – ou supérieur – à celui de vos collègues masculins.
Le véritable courage, c’est de se lever et d’exiger une meilleure représentation, un meilleur traitement et de meilleurs débouchés.
Voilà ce qu’est le courage pour moi.
La dernière valeur dont je veux parler est l’humilité.
Comprenez-moi, il est important de faire le point sur ce que nous avons accompli tous ensemble. Un cabinet paritaire, par exemple, est une réalisation extraordinaire – dont je suis tout spécialement fier.
Mais en soulignant nos victoires, nous devons aussi penser au travail important qui reste à accomplir.
Le Canada a une fière tradition de femmes fortes et ambitieuses qui se sont levées et ont lutté pour le changement. Des progrès concrets et significatifs s’en sont suivis.
La tâche qui nous attend est immense. Nous devons en faire plus pour régler les problèmes qui ont des effets négatifs sur les femmes jour après jour. Des problèmes comme l’équité salariale, l’accès à des services de garde de qualité et la parité, non seulement au Cabinet, mais aussi au Parlement dans son ensemble.
Et en toute humilité, nous devons sans cesse nous rappeler de la position extrêmement privilégiée qui est la nôtre, par le seul fait d’être rassemblés ici même dans cette salle magnifique, et dans cette ville magnifique. Nous devons nous servir de notre privilège pour défendre le changement, à la fois dans nos propres communautés, mais aussi sur la scène internationale.
Nous devons nous souvenir de toujours remettre en cause le statu quo. Peut-être est-ce ce qui nous a rassemblés ici aujourd’hui, mais il en va de notre responsabilité de nous montrer plus inclusifs, de créer des débouchés et de toujours exiger mieux – de nous-mêmes et des autres.
Ces quatre valeurs – autonomisation, responsabilisation, courage et humilité –, ne doivent pas être les nôtres seulement parce qu’elles nous permettent de gagner des distinctions ou d’avoir une meilleure estime de nous-mêmes.
Ce sont des valeurs que nous devons tous chercher à mettre en pratique chaque jour, car, ce faisant, nous aidons à bâtir un monde qui tient sa promesse d’une plus grande égalité.
Et l’égalité, qu’elle s’applique à une employée, une cliente, une collègue ou une citoyenne, n’est pas une menace, mais une chance.
Je vous remercie de reconnaître le travail que mon gouvernement a accompli. Cette reconnaissance n’est pas seulement un honneur, mais aussi un défi.
Le défi de créer plus de débouchés pour les femmes et les filles canadiennes pour qu’elles exploitent leur plein potentiel. Ce soir, je vous demande de mettre au défi les personnes autour de vous, vos collègues, vos amis, et surtout les personnes qui ne sont pas présentes ici dans cette salle.
Après tout, nous sommes tous des convertis.
Et si ces personnes vous demandent s’il reste vraiment encore beaucoup à faire, dites-leur de poser cette question à une femme de leur connaissance.
Merci.