Notes d’allocution par le chef du Parti libéral du Canada, Justin Trudeau, à la Chambre de commerce et d’industrie de Québec
15 octobre 2014
« Bâtir le pays que nous voulons »
Je crois que le Québec se trouve dans un moment important, qu’il entame un chapitre captivant.
Alors, j’aimerais proposer aux Québécoises et aux Québécois un nouveau projet, une nouvelle vision.
J’ai passé beaucoup de temps dans les différentes régions du Québec depuis mon élection comme chef du parti. J’ai rencontré des milliers de gens. J’ai pris le temps de bien les écouter.
Trop de Québécois m’ont dit être anxieux. Pour la première fois de notre histoire, certainement depuis la Révolution tranquille, ils ont l’impression que la génération qui suivra en arrachera plus que la leur. Les acquis des derniers cinquante ans – des revenus croissants, des pensions au moment de la retraite, un filet social qui assure que les moins nantis ne deviendront pas des citoyens de deuxième classe – ne sont plus garantis.
Que je sois sur les quais en Gaspésie, dans un rodéo en Mauricie, sur une ferme dans les Laurentides, ou dans un café à Montréal ou à Québec, les Québécois me disent la même chose : ils sont inquiets face à l’avenir.
Et je vous le confirme : cette incertitude n’est pas unique au Québec. Elle est répandue à travers tout le pays. Partout. Et oui, même dans l’Ouest.
Donc, le projet auquel je veux convier les Québécois dépasse les frontières du Québec.
C’est un projet canadien dans lequel les Québécois peuvent- et doivent – jouer un rôle important.
S’il y a un endroit au Canada où les gens comprennent que nous avons une responsabilité collective les uns envers les autres, c’est bien ici au Québec.
Alors, je veux vous parler de trois grands chantiers dans lesquels les Québécois joueront un rôle déterminant au Canada du 21e siècle.
Le premier chantier est économique. Il consiste à assurer que les générations qui nous suivront auront accès aux mêmes chances que les générations qui nous ont précédées.
Si le Canada a pu prospérer depuis la Deuxième Guerre mondiale, c’est grâce à la force économique de sa classe moyenne. Or, nous voyons aujourd’hui que nous ne pouvons plus tenir cette réalité pour acquise.
L’état ne crée pas les emplois, mais il peut créer les conditions propices aux investissements et à la prospérité économique. Et il a un rôle essentiel pour aider à créer des opportunités et d’assurer l’égalité des chances pour tous ses citoyens.
Certains veulent nous faire croire que tout va bien en soulignant que nous sommes en meilleure posture que certains pays d’Europe. Mais regardez autour de vous. Vous savez bien que tout n’est pas rose.
Nous savons que la classe moyenne en arrache. Qu’elle est surendettée. Nous savons que les jeunes, même les plus instruits, n’arrivent pas à se trouver des emplois à la mesure de leurs talents et de leurs rêves. Nous savons que la plupart des familles n’auront pas assez d’épargne en vue de leur retraite. Nous voyons bien que les riches deviennent plus riches et que de plus en plus de gens tombent en bas de l’échelle.
L’essence du contrat social canadien a toujours été que notre travail acharné assurera notre succès, mais aussi l’avenir de nos enfants et nos petits-enfants.
Ce contrat est menacé.
Nous devons investir si nous voulons nous assurer qu’il survive.
Investir pour créer des opportunités économiques pour tous les Canadiens.
Il est temps que nous nous dotions d’infrastructures dignes d’un pays du 21e siècle. Je sais que dans la région de Québec, vous avez des besoins criants en infrastructures, d’investissements qui créeront de l’emploi de qualité maintenant, mais aussi de la croissance économique dans le futur. Pour que nous puissions avoir une population éduquée et des travailleurs qualifiés, il nous faut aussi investir en éducation.
Il faut aider nos petites et moyennes entreprises à accéder aux marchés mondiaux. Il faut encourager l’innovation de manière à faire du Canada un leader que ce soit dans le domaine énergétique, dans les technologies vertes et dans l’économie du savoir. Il faut soutenir notre industrie culturelle au Québec et ailleurs au Canada, parce qu’elle est créatrice de richesse – économique et identitaire.
Il faut un gouvernement qui est prêt à investir dans notre avenir de façon responsable et discipliné en respectant l’environnement et à l’écoute de nos communautés.
Pour faire ces changements, le Canada a besoin des Québécois.
Le deuxième chantier est celui de la qualité de notre démocratie.
Le Québec est l’une des sociétés les plus démocratiques qui soient.
Je ne dis pas cela légèrement. Je le crois profondément. Et c’est l’une des choses qui me rend le plus fier d’être Québécois.
Le débat récent qui a eu lieu à l’Assemblée nationale sur le projet de loi de mourir dans la dignité a été un grand moment de démocratie. Les parlementaires se sont élevés au-dessus de la partisanerie et ont débattu respectueusement d’un enjeu moral difficile.
Depuis qu’il est arrivé au pouvoir, M. Harper a montré peu de respect envers les institutions démocratiques. Il a manipulé l’information, il a miné la crédibilité de nos scientifiques, il a étouffé la dissension, en plus il a fait de notre Parlement une institution dans laquelle les Canadiens ne se reconnaissent plus. Augmenter le cynisme des gens est devenu pour lui une tactique politique.
En contraste, depuis qu’il est arrivé au pouvoir, M. Harper a montré peu de respect envers les institutions démocratiques. Il a manipulé l’information, il a miné la crédibilité de nos scientifiques, il a étouffé la dissension, en plus il a fait de notre Parlement une institution dans laquelle les Canadiens ne se reconnaissent plus. Augmenter le cynisme des gens est devenu pour M. Harper une tactique politique.
Comme vous pouvez vous l’imaginer, j’ai une approche complètement différente. Non seulement doit-on s’assurer que les citoyens ont confiance en leurs élus, mais en tant qu’élus, nous devons démontrer que nous faisons confiance aux citoyens.
Je crois qu’il est temps de changer notre système électoral et adopter un vote préférentiel. J’ai agi pour sortir la partisanerie et le favoritisme politique du Sénat. Je veux réformer notre Parlement avec plus de votes libres pour avoir des débats informés et rigoureux, et créer un système d’accès à l’information digne d’un gouvernement du 21e siècle.
Au fond, je veux changer la façon dont nous faisons de la politique dans ce pays.
Je veux gouverner dans le meilleur intérêt de tous. Pour les prochaines générations et pas juste pour les prochaines élections. Je veux être le premier ministre de tous les Canadiens, pas juste des régions qui ont voté pour mon parti.
Je tiens à ce que notre débat démocratique se fasse dans le respect des opinions de tous. Je veux vivre dans un pays ou tous les citoyens sentent qu’ils ont une contribution à faire. Je veux encourager une culture politique inclusive et respectueuse.
Un premier ministre doit faire confiance aux Canadiens. Il doit faire preuve de transparence, d’écoute et oui, il doit répondre aux questions des journalistes. C’est ça aussi la démocratie.
Dans une démocratie, la presse a un rôle essentiel : celui de bien informer les citoyens et interpréter les enjeux auxquels nous faisons face. Et la base de toutes démocraties consiste en des citoyens intéressés et informés.
Prenez l’exemple de Radio-Canada. C’est une institution publique essentielle qui permet de tisser des liens entre toutes les régions du pays dans les deux langues officielles. Plutôt que de couper dans ses services, nous devrions investir et rendre cette institution encore plus forte. Dans un pays aussi vaste et diversifié que le nôtre, elle est devenue essentielle à la qualité de notre vie démocratique.
Pour faire ces changements, le Canada a besoin des Québécois.
Le troisième chantier dont je veux vous parler est le rayonnement de nos forces et de nos valeurs, en tant que Québécois, ici au Canada, et dans le monde.
Nous vivons dans une fédération. Il nous faut constamment revenir à l’idée fédérale – cette idée que nous devons travailler ensemble, dans le respect des différences, pour arriver à nos objectifs communs. Mais pour cela, nous devons nous investir, nous Québécois, à redevenir des partenaires actifs au sein de la fédération canadienne.
Tous les défis auxquels nous faisons face ne peuvent être résolus uniquement d’Ottawa. Ils exigent un vrai partenariat entre le gouvernement fédéral et les provinces ; une vision fédérale qui respecte les compétences provinciales. Cela nécessite un dialogue continu. C’est pourquoi, en tant que premier ministre je tiendrais une rencontre annuelle avec tous les premiers ministres provinciaux et territoriaux.
Tous les défis auxquels nous faisons face ne peuvent être résolus uniquement d’Ottawa. Ils exigent un vrai partenariat entre le gouvernement fédéral et les provinces dans lequel les compétences provinciales sont respectées. Cela nécessite un dialogue continu. C’est pourquoi je m’engage à tenir une rencontre annuelle avec tous les premiers ministres provinciaux et territoriaux.
Étant donné le caractère unique de la société québécoise, le gouvernement du Québec a des responsabilités particulières. Si mon parti est porté au pouvoir, les Québécois peuvent avoir confiance que mon gouvernement respectera cela et fera tout pour appuyer et promouvoir le fait français et la culture québécoise, ici au Canada et à l’étranger. Cela fait partie de qui nous sommes en tant que Canadiens.
Les Québécois me disent régulièrement que ce n’est pas assez de se débarrasser du gouvernement Harper. Ils ne veulent pas juste un gouvernement différent, ils veulent un gouvernement meilleur. Un gouvernement qui reflète leurs valeurs, leurs espoirs et leurs aspirations. Un gouvernement avec des Québécois forts à la table où se prendront les décisions.
Nous sommes un pays fondamentalement ouvert sur le monde. Notre prospérité économique et notre qualité de vie en dépendent. Nous avons jadis joué un rôle important dans les institutions internationales. Aujourd’hui, plus personne ne veut savoir ce que le Canada pense. M. Harper ne semble pas comprendre que ça ne sert à rien de crier dans le micro si la salle est vide, or c’est exactement ce qu’on a vu il y a quelques semaines quand il s’est présenté à l’ONU. Nous sommes devenus marginaux et impuissants sur la scène mondiale.
Nous devons jouer un rôle constructif en nous réengageant et en donnant l’exemple de comment nous avons fait de nos différences une force et non une faiblesse.
Nous avons aussi une responsabilité, une obligation morale de mener sur le dossier des changements climatiques. Agir comme des spectateurs ne fera que nuire à notre statut dans le monde et à notre prospérité économique.
Je sais que les Québec ne se voit plus dans l’image que projette le Canada à l’étranger.
Pour changer cela, le Canada a besoin des Québécois.
D’ici un an, il y aura des élections fédérales.
Le parti conservateur proposera d’atrophier l’état fédéral avec des coupures d’impôts idéologiques. Du même coup, il accroitra les inégalités et servira seulement les intérêts des plus fortunés.
Nous les Québécois, nous savons que cela n’améliorera pas notre sort. Nous savons que nous avons besoin d’une équipe forte de Québécois au cœur du gouvernement fédéral.
Mon parti, le parti libéral, proposera d’investir dans notre avenir collectif, dans la prospérité de notre classe moyenne, dans notre qualité de vie et surtout dans nos générations futures.
Nous avons toutes les raisons d’être optimistes face à l’avenir. Nous, les Québécois, nous sommes des bâtisseurs. Travaillons ensemble pour que notre contribution au sein du Canada soit à la hauteur de ce que nous avons à offrir. Et assurons-nous de léguer à nos enfants un pays dont nous serons fier.
Merci.
La version prononcée fait foi